Interdiction des Taxis-Motos et Tuk-Tuks à Bujumbura : un an après, que sont devenus les 20.000 conducteurs ?

Article : Interdiction des Taxis-Motos et Tuk-Tuks à Bujumbura : un an après, que sont devenus les 20.000 conducteurs ?
Crédit: © VOA Afrique
13 juin 2023

Interdiction des Taxis-Motos et Tuk-Tuks à Bujumbura : un an après, que sont devenus les 20.000 conducteurs ?

Bujumbura, 14 juin 2023 – Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique du Burundi prend la décision d’interdire l’accès de la majorité de Bujumbura, la capitale économique du pays, aux quelque 20 000 taxis-motos, taxis-vélos, taxis-tricycles et tuk-tuks qui y opèrent. Un an après, que sont devenus les conducteurs de deux et trois roues ?

Des taxis-motos et taxis-vélos dans la ville de Bujumbura.
© VOA Afrique


Un an après la mesure, les habitants de Bujumbura peinent encore à se relever. « Avant, une course à vélo aller de 200 à 500 Fbu, une à moto de 500 à 1 000 Fbu, et celui de Moto-tricycle ou de taxi, de 1 500 à 3 000 Fbu. Mais maintenant, une simple course en taxi ne coûte pas moins de 10 000 Fbu et le prix du bus à remarquablement augmenté. » Témoigne Christophe un jeune Bujumbourois.

Une reconversion difficile

« Après la sortie de la mesure, j’ai été obligé de rentrer au village. À l’époque, j’avais 3 vélos et cela me permettait un peu de subvenir aux besoins de ma famille. J’ai dû les vendre pour acheter de l’engrais et cultiver un petit champ que mes parents m’ont cédé à mon retour. Mes enfants ont arrêté l’école, ils m’aident au champ, mais malgré ça, je ne parviens toujours pas à assurer correctement leur restauration. Cela reste très difficile. » témoigne Jules, un ancien taxi-vélo reconverti. « Nous sommes rentrés avec plusieurs de mes amis, et je peux dire que j’ai eu de la chance. Les autres ont dû partir en Tanzanie accrochaient à des camions pour chercher du travail. » ajoute-t-il.

Un conducteur de taxi-vélo accrocher à un camion pour se rendre à l’intérieur du pays.
© MBONANKIRE Fabrice

à Bujumbura, plusieurs familles qui avaient investi dans les moyens de transport, secteur florissant à l’époque, ont été sévèrement touchées par cette mesure. Justine, ancienne propriétaire des Moto-Tricycles témoigne « Nous avions 3 Tuk Tuk avec une recette d’au moins 20.000 Fbu par jour, par Tuk Tuk, donc au moins un total de 1.500.000 Fbu chaque mois pour les trois, On parvenait aisément à joindre les deux bouts. Quand la mesure est sortie on se disait que c’était provisoire donc mon mari avait décidé de ne pas vendre nos Tuk Tuk, mais 6 mois après nous avions fini nos économies et notre épargne ne pouvait plus nous permettre de tenir encore longtemps, quand mon mari a enfin décidé de vendre, il était trop tard, personne ne pouvait les acheter, alors nous avons décidé d’aller les vendre au Congo et même là-bas nous avions beaucoup perdu et ça nous a beaucoup affectés »

Des témoignages pareils vous en trouverez des centaines voire des milliers dans la ville. Beaucoup
de familles ont eu du mal à se relever de cette mesure. La crise dans le secteur du transport et du carburant est venue mettre la poudre au feu.

Les lois sont plus lourdes que les pierres

L’économie Burundais dépend en grande partie des institutions étrangères et des aides étrangères. Quelques mois après la sortie de la mesure, l’entreprise LADAK considérait comme le plus important importateur des taxis-motos, et des tricycles, tente tans bien que mal de rassurer ses clients qui avaient déjà passé leurs commandes en ayant payé la totalité des frais et qui ensuite voulais être remboursés, considérant que le domaine du transport ne sera plus aussi rentable qu’avant. Certains clients disent qu’ils n’ont jamais été remboursés et soupçonnent la société Ladak d’utiliser leurs argents pour s’approvisionner.

Au-delà de faire des victimes chez les conducteurs de ses moyens de transports, cette mesure a aussi mis plus au moins une centaine de familles au chômage et brisé le rêve et l’avenir de plusieurs personnes du jour au lendemain. « J’étais agent de vente, mais du jour au lendemain J’avais perdu mon boulot, c’est qui m’attriste c’est le fait que les personnes qui avaient plus besoin de ce travail, ce sont eux qu’on a renvoyés. Des ouvriers, des agents des ventes etc. En tout cas je n’aurai jamais imaginé une telle chose m’arriver en plein début de l’année. » Témoigne Marc, ancien salarié d’une société de vente de moto à Bujumbura.

Chez nous ont dit « Gukenera cyane guhishura ibanga » ça veut dire « Une extrême nécessité fait dévoiler le secret ».

Certaines personnes ont trouvé un moyen de tirer bénéfice de cette mesure et créer des activités innovantes, comme ce jeune homme Luck, qui a transformé la voiture familiale en taxi muni d’un GPS qui permet de prendre les enfants de la maison à l’école sans que les parents ne s’inquiètent ou encore cette fille Keza qui avec sa voiture se propose de faire vos courses et vous permet d’économiser pas mal d’argent.

© DOM pour Jeune Afrique


Chaque société traverse des crises, et c’est normal que certaines personnes en profitent pour créer et innover, mais qu’en est-il de ceux qui n’ont pas les moyens de le faire ? Qu’en est-il de ces personnes avec un revenu de moins de 0.5$/jour et qui doivent nourrir leurs familles ? Ou encore de ces personnes qui ont tout abandonné pour venir chercher la vie à Bujumbura et qui ont tout perdue? « Ninde wakoze ingoma azi neza ibiri muriyo », « Qui a fabriqué le tambour sait le mieux ce qui est dedans ».

C’est donc normal aujourd’hui que ces personnes-là attendent une action des autorités face à cette mesure qui leur à fait perdre leur travail. C’est tout à fait légitime qu’aujourd’hui encore on se demande qu’en est-il des rêves et de l’avenir de tous ces conducteurs de Taxi vélo, Moto et de moto-tricycle de Bujumbura ?

Partagez

Commentaires